Les catastrophes naturelles récurrentes, la propagation des incendies, l’assèchement croissant des sols cultivables et la diminution de la biodiversité sont des facteurs qui engendrent une inquiétude chez environ 10,5 millions de Français. Explorons les résultats publiés par l’ADEME, l’Agence de la transition écologique.
Comprendre l’écoanxiété
Le terme d’écoanxiété n’est pas clairement défini dans le domaine médical et n’est pas reconnu comme un trouble psychiatrique dans le DSM-5, qui est le manuel de référence pour les troubles mentaux, mis à jour pour la dernière fois en 2013.
L’Association Américaine de Psychologie (APA) décrit l’écoanxiété comme une crainte persistante face à une catastrophe écologique imminente.
Les descriptions de l’écoanxiété convergent généralement vers un sentiment d’inquiétude, d’angoisse ou de peur lié aux perturbations environnementales actuelles ou aux menaces futures sur notre milieu, notamment dues aux changements climatiques.
Il existe différentes perspectives concernant ce phénomène : pour certains, l’écoanxiété affecte des individus déjà prédisposés à l’anxiété, exacerbée ici par le changement climatique. D’autres, cependant, estiment que l’écoanxiété touche des personnes ayant un lien fort avec la nature, sans prédisposition notable à l’anxiété.
Deux recherches récentes soutiennent cette dernière hypothèse. Une étude en Australie en 2021 a révélé que les enfants, les jeunes adultes et les populations autochtones sont particulièrement vulnérables à l’écoanxiété. Une autre étude menée par Sciences Po Grenoble en 2021 a identifié un profil typique des écoanxieux : jeunes, urbains, majoritairement féminins et bien éduqués, sans troubles anxieux spécifiques.
Les jeunes, premières victimes de l’écoanxiété
L’ADEME a mené une enquête auprès d’un échantillon de 998 Français âgés de 15 à 64 ans, publiée le 15 avril.
Le rapport révèle que l’intensité du mal-être varie. Sur les 10,5 millions de Français concernés, 6,3 millions seraient « modérément affectés », 2,1 millions « fortement touchés » et 2,1 millions « extrêmement affectés ».
Selon l’ADEME, 420 000 individus « pourraient risquer un trouble psychopathologique » en raison de leurs angoisses liées à la dégradation de l’environnement, pouvant mener à une dépression ou un trouble anxieux.
L’écoanxiété impacte toutes les tranches d’âge, mais les moins de 34 ans sont les plus concernés : parmi eux, 5% sont extrêmement écoanxieux, 8% chez les moins de 24 ans et 10% chez les 25-34 ans.
Les tranches d’âge de 15-24 ans et de 25-34 ans sont les plus touchées, avec respectivement 13% d’entre eux fortement ou très fortement écoanxieux, contre 11% des 35-49 ans et 6% des 50-64 ans.
Le genre joue également un rôle : bien que les femmes soient plus souvent écoanxieuses (58%) que les hommes (42%), ces derniers présentent des symptômes d’angoisse plus sévères.
Les citadins diplômés, plus susceptibles à l’écoanxiété
Plus on réside dans une grande ville, plus le niveau d’écoanxiété est élevé. Dans les zones urbaines de plus de 100 000 habitants et en Île-de-France, les résidents sont particulièrement préoccupés par les changements climatiques. 9% des habitants en milieu rural sont fortement ou très fortement écoanxieux, contre 12% dans l’agglomération parisienne.
Le niveau d’éducation influence également le risque d’écoanxiété : 20% des détenteurs d’un bac professionnel sont concernés, contre 34% pour les titulaires d’un bac+3 et 35% pour ceux ayant un bac+4 ou bac+5.
Dans ses conclusions, l’ADEME souligne que « l’écoanxiété est une réaction légitime face à la crise environnementale » et appelle à une prise en charge et à une réflexion institutionnelle autour de cet enjeu de santé mentale et publique.
Le rapport recommande aussi de permettre aux citoyens de réaliser un autodiagnostic pouvant mener à un soutien psychologique et propose la création d’une chaire de recherche dédiée à l’écoanxiété pour mieux lier chercheurs et spécialistes de la santé mentale.
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